"Les mots, c'est évident, sont la plus puissante drogue utilisée par l'humanité" Kipling
Là, le regard perdu face à la mer, elle pense. Sa vie, son existence,
sa solitude. Ses yeux d'acier se noient dans les faibles remous d'une
Méditerranée en repos. Calme. Apaisée. Elle s'enivre de ce bleu
profond, intense, de ses senteurs salines, de la fraîcheur maritime qui
effleure délicatement sa peau encore trop pâle. Elle aime admirer
l'immensité de la mer, y découvrir ses mystères, y puiser ses secrets.
La mer l'intrigue, elles se ressemblent tant. Dans son esprit tout est
vide, englouti par un flot destructeur de pensées qui, comme l'écume
sur les rochers, s'entrechoquent. Tout est flou. Rien n'émerge. Elle
coule et le sais. Qu'est-ce que sa vie? Qu'est-ce que LA vie face à ce
qu'elle ne peut maîtriser? Elle l'ignore.
Depuis sa plus tendre
enfance, notre héroïne aux yeux aciers voit dans la mer la Mort. Elle
en a peur, la craint terriblement. Elle redoute le tumulte des vagues,
le bleu impénétrable et la profondeur dans lequel se cache les trésors
engloutie par la Mort. La mer est la bouche de la Mort. Immense pour
l'humanité. Belle pour nous rassurer. Chaude et bienfaisante pour nous
y attirer. Voilà ce qu'est la mer pour cette esprit farouche et
vagabond.
Alors, lorsq
u'elle s'assoit sur cette digue qui plonge
dans ces mystérieuses eaux, elle est face à son existence, une
introspection. Cela l'apaise. Elle vogue sur la vie comme les petits
voiliers qu'elle aperçoit au loin...
Elle se noie, littéralement.
Engloutie par les flots d'une existence qui la dépasse, qui la ballotte inexorablement.
Elle coule, coule, coule...comme un petit marin à la mer, tombé du paquebot insubmersible de la vie.
Elle
lutte pourtant mais rien n'y fait, notre petit matelot ne rattrape pas
les bouées que lui lancent inlassablement ses camarades encore sur le
pont...
Elle lutte...
sa tête émerge, puis disparaît pour
réapparaître aussitôt. Elle lutte contre les vagues mais qu'est-elle
réellement au milieu de l'immensité de cette eau sombre et
profonde...pas grand chose, tout juste de quoi nourrir un poisson.
Ohé, ohé matelot...Ohé, ohé matelot...tout disparaît. La mer l'a engloutie.
Elle ne vit plus, elle survit.
Elle survit.
Elle veux vivre.
Petit matelot qui attend désespérément le prochain départ du paquebot Existence. Petit matelot bien insignifiant en soi mais si brave parfois...
Petit matelot?